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Bonjour, et bienvenue à Dieu au quotidien, notre série d’études méditatives sur l’évangile selon Jean ! Aujourd'hui, nous en sommes au troisième jour de notre étude du onzième chapitre, et notre réflexion se concentrera sur les versets 28 à 37.
Nous avons considéré ensemble l’événement de la maladie et de la mort de Lazare, un ami proche de Jésus, et la réaction de Jésus à la nouvelle de sa grave maladie. Il a attendu plusieurs jours avant de se rendre chez lui et pendant ce temps Lazare est mort. C’est une des choses que Jésus a faites pour anticiper le signe miraculeux qu’il allait accomplir. Puis Jésus a voyagé pendant plusieurs jours pour aller à Béthanie, et, à son arrivée, il a invité Marthe, la sœur de Lazare, à croire en lui, en lui promettant que son frère ressusciterait. C’est alors que Jésus se met à pleurer en rejoignant la famille et les amis de Lazare qui pleuraient eux aussi de tristesse. Nous l’apprenons au verset 35 de notre chapitre : « Jésus pleura », une phrase courte et poignante qui témoigne de son émotion profonde pour son ami.
Lisons ensemble les versets 28 à 32 de ce récit : « Après avoir dit cela, elle alla appeler secrètement sa sœur Marie en lui disant: ‘Le maître est ici et te demande.’ A ces mots, Marie se leva sans attendre et alla vers lui. Jésus n'était pas encore entré dans le village, mais il était à l'endroit où Marthe l'avait rencontré. Les Juifs qui étaient avec Marie dans la maison et qui la consolaient la virent se lever soudain et sortir; ils la suivirent en disant: ‘Elle va au tombeau pour y pleurer.’ Marie arriva à l'endroit où était Jésus. Quand elle le vit, elle tomba à ses pieds et lui dit: ‘Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort.’ »
Marie répète presque mot à mot ce que Marthe avait déjà dit à Jésus en tombant aux pieds de Jésus. Les deux sœurs ont dû dire et répéter cette phrase de nombreuses fois dans le regret depuis la mort de leur frère. C’est dire leur confiance en Jésus ; elles étaient sûres qu’il aurait guéri leur frère s’il avait été sur place. Il est intéressant de noter que chaque fois que Marie apparaît dans les évangiles, elle s’humilie aux pieds de Jésus. Les deux sœurs réagissent chacune à sa manière. Marthe sort et va immédiatement à la rencontre de Jésus lorsqu’elle apprend qu’il arrive, alors que Marie reste assise chez elle, et elle a attend que Jésus l’appelle. On pourrait dire que Marthe est une activiste. On sait que c’est elle qui préparait les repas pour Jésus et ses disciples, alors que Marie écoutait l’enseignement de Jésus à ses pieds. Marie est plutôt contemplative.
Les deux femmes semblent dire exactement la même chose, mais le mot « mon », pour « mon frère », n’est pas placé au même endroit dans le texte original grec. Marthe, où le mot « mon » est présent, souligne que c'est son frère qui est mort dans le sens de « voilà ce qui m’est arrivé. » Marie, formule sa phrase différemment. Elle dit bien que c’est son frère qui est mort, mais elle souligne plutôt le chagrin que sa mort a provoqué. Elles exprimaient toutes deux leur douleur de manière différente. Marthe était très loquace et avait besoin de parler. Marie était en larmes et voulait se taire aux pieds de Jésus. Ce qui est formidable, c’est que Jésus ne fait pas de différence entre elles et leur répond avec la même affection et la même sympathie. Jésus voit notre chagrin et nous soutien, quelle que soit la façon dont nous l’exprimons.
Voici donc ce qu’il se passe ensuite. Nous lisons ceci aux versets 33 à 37 : « En la voyant pleurer, elle et les Juifs venus avec elle, Jésus fut profondément indigné et bouleversé. Il dit: ‘Où l'avez-vous mis?’ ‘Seigneur, lui répondit-on, viens et tu verras.’ Jésus pleura. Les Juifs dirent alors : ‘Voyez comme il l'aimait!’ Et quelques-uns d'entre eux dirent : ‘Lui qui a ouvert les yeux de l'aveugle, ne pouvait-il pas aussi faire en sorte que cet homme ne meure pas?’ »
Jésus voit Marie pleurer. Il voit les Juifs qui l'accompagnaient, qui étaient en deuil avec elle, ses amis, sa famille et les membres de la communauté. Il les voit pleurer. Et l’évangile précise que Jésus fut d'abord ‘profondément indigné et bouleversé’.
En grec l’expression « profondément indigné » évoque un reniflement strident, le genre de reniflement bruyant qu’on exprime lorsqu'on est en colère. Il évoque davantage la colère que la tristesse. Face à la mort, Jésus ressent un sentiment de colère. La mort est une ennemie, elle fait souffrir les témoins de la mort d’un être cher. Or Jésus est la résurrection et la vie. Comment ne pas se mettre en colère lorsqu’il se trouve en face de cette réalité de la mort qu’il est venu vaincre sur la croix ? La terreur de la mort provoque la colère de Dieu. Jésus en éprouve de l’angoisse et il en est profondément troublé. Le mot grec pour ‘bouleversé’, ou ému, évoque même le tremblement. Jésus était tellement affecté par la réalité de la mort qu’il en tremblait de colère, au point qu’il se mit à pleurer. Quand Jésus pleure, c’est Dieu qui pleure. Celui qui est la résurrection et la vie prend la mort au sérieux. La mort provoque une tristesse légitime. Comment pourrait-on se réjouir devant la mort d’un être cher ? Jésus verse des larmes au lieu de pointer du doigt ceux qui pleurent et leur dire : « Pourquoi pleurez-vous ? Ne savez-vous pas ce que je peux faire ? Est-ce que vous ne me faites pas confiance ? » Jésus pleurait parce qu’il se souciait de ceux qui souffraient. Il souffrait avec ceux qui souffraient. Même s’il savait ce qu’il allait faire bien avant de se rendre à Béthanie, même s’il contemplait le moment où la gloire de Dieu se manifesterait, il faisait face à la réalité de la mort comme tout autre être humain devrait le faire, c’est-à-dire avec tristesse à cause de la personne défunte et avec beaucoup de sympathie à l’égard de ceux qui l’ont connue et aimée.
Cette réalité nous lance un défi de manière spécifique. Ce défi est de comprendre que la foi, la foi authentique, ne signifie pas que je doive perdre toute émotion, notamment la tristesse et la colère face à la mort. Beaucoup de croyants le pensent pourtant : « Eh bien », disent-ils, « si vous faites vraiment confiance à Dieu, vous savez vraiment que Dieu finira par tout arranger. Vous savez vraiment que le paradis vous attend. Vous savez vraiment que quels que soient les problèmes que vous rencontrez sur cette terre, Dieu les résoudra finalement au paradis. Si vous croyez vraiment cela, pourquoi éprouveriez-vous des émotions, des émotions négatives ? Pourquoi pleureriez-vous ? Pourquoi seriez-vous triste ? Pourquoi souffririez-vous ? » En fait, ce n'est pas du tout l'exemple que Jésus nous donne. Il a pleuré avec ceux qui pleuraient. D’ailleurs l’apôtre Paul, qui conformait son attitude à celle de Jésus, a donné cet ordre aux chrétiens dans sa lettre aux Romains : « Réjouissez-vous avec ceux qui se réjouissent. Pleurez avec ceux qui pleurent. » Jésus était sur terre un homme comme les autres. Il n’avait rien à voir avec les caricatures des films modernes et d’émissions télévisées qui le représentent comme un être dépourvu d’émotions, le regard vide, flottant au-dessus du sol, et sans connexion avec le monde qui l’entoure. Cette représentation plus ou moins mystique n’a rien à voir avec le Jésus de l’Évangile ! Avoir la foi, croire à la résurrection ne veut pas dire être dépourvu d’émotion. Les chrétiens savent bien sûr que tous les croyants vont au paradis. S’ils pleurent sincèrement, ils pleurent dans l’espérance, mais cette espérance, cette attente vivante, ne supprime pas la tristesse. La mort est douloureuse. Cette douleur n’aurait jamais dû exister si le mal était éradiqué, mais elle est là, et il nous faut réagir à la douleur des autres avec compassion, avec bonté.
Pleurons avec ceux qui pleurent ! Non seulement nous exprimons nos émotions, mais nous soutenons aussi ceux qui sont gravement affectés par la séparation définitive d’un être cher, qui sont confus et se sentent perdus. Avant d’agir, comme il va le faire avec Lazare, Jésus a commencé par s’indigner et s’émouvoir profondément, puis il a pleuré avec ceux qui souffraient de la séparation inévitable que cause la mort. Ce n’est qu’après qu’il a agi.
Je vous invite ici à penser à la façon dont cela s'applique aux personnes que vous aimez, aux personnes qui occupent une place importante dans votre vie, à votre conjoint, à votre mari, à votre femme. Les écoutez-vous ou leur faites-vous simplement la morale ? Essayez-vous simplement de trouver rapidement une solution à vos problèmes relationnels ? Je sais que je parle plus aux maris qu'aux femmes maintenant, mais même les femmes essaient de faire cela parfois. Nous essayons de trouver une solution aux difficultés parfois insurmontables que nous rencontrons, et nous ne sommes pas sensibles à la douleur de ceux qui souffrent.
Parfois, nous avons juste besoin que quelqu'un nous prenne la main. Par exemple, prenez-vous la main de vos enfants ou pointez-vous le doigt vers vos enfants, si vous êtes un parent ? Il est trop facile d'oublier que ce sont de vraies personnes avec de vrais sentiments.
En ce qui concerne vos amis, comment réagissez-vous lorsqu’ils traversent des moments difficiles ? Êtes-vous attentifs à leur situation ou bien les abandonnez-vous à leur sort ? Ou bien adoptez-vous l’attitude que suggère le proverbe biblique qui dit : « L’ami aime en tout temps, et dans le malheur, il se montre un frère ? » Êtes-vous de ceux qui disent : « Quand la vie est frustrante pour toi, je veux être une source d'espoir. Je veux être une source de réconfort ? » L'amour signifie que je m'engage dans la vie avec les autres, même et surtout s'ils sont confus ; la foi signifie non pas que je perds toute émotion, mais que, dans la tristesse et les larmes partagées, et soucieux des autres, je fais confiance à Dieu, dans les hauts comme les bas de la vie.
Le réaction de ceux qui assistaient à cette scène saisissante en voyant Jésus pleurer était mitigée. Pour certains, c’était l’intime conviction que Jésus aimait vraiment Lazare, mais pour d’autres, c’était un signe d’impuissance, l’aveu de la faiblesse de Jésus face à la mort. On comprend alors que Jésus - qui connaissait les pensées négatives de ses opposants à son égard -, ait pu exprimer dans ce contexte son indignation et son émotion face à leur incrédulité et leurs railleries. La méchanceté et la médisance s’expriment quelles que soient les circonstances, même quand c’est le moment de pleurer un mort. Ces moqueurs étaient-ils vraiment capables de verser des larmes sincères ou bien de verser seulement des larmes de crocodile ? Leur sincérité est tout du moins mise en question à cause de leur attitude envers celui qui faisait toujours du bien autour de lui.
Jésus a pleuré. Que ces brèves paroles si puissantes soient un défi pour nous ! J'espère qu'elles vous interpellent aujourd'hui. Prenons donc un moment pour prier en disant : « Seigneur mon Dieu, rends-moi toujours plus sensible à la souffrance des autres. Je veux suivre ton exemple, me tenir silencieux auprès de ceux qui souffrent et particulièrement avec ceux qui ont perdu un être cher. Que ma sympathie soit sincère et vraie. Que je puisse ressentir leur peine et leur douleur. Merci parce que tu ne nous regardes pas de haut, parce que toi qui es la résurrection et la vie, tu prends la mort au sérieux, que tu ne la supportes pas et que tu as tout fait pour qu’elle ne nous sépare pas de toi. Tu nous rendras la vie que nous allons perdre un jour ici-bas, et tu nous prendras avec toi pour l’éternité. Merci pour la foi qui nous donne la force de croire à la résurrection ! En attendant, Seigneur, nous voulons suivre ton exemple et pleurer avec ceux qui pleurent, car la mort est horrible, le mal est affreux. Permets que nous soyons toujours indignés et émus, comme tu l’as été, et que nous profitions du temps qui nous reste à vivre ici-bas pour parler à ceux qui nous entourent de l’espérance que tu veux nous donner par la foi. Rends-nous sensibles à leur besoin de te connaître et de te servir pour se préparer à te rencontrer le jour où ils quitteront ce monde. Seigneur, nous voulons te ressembler de plus en plus. Merci de pleurer avec nous quand la tristesse nous accable. Merci parce que notre tristesse ne nous enlève pas l’espérance et la vraie joie de savoir que nous sommes en toi, et que tu seras toujours avec nous et en nous. C’est en ton saint nom que nous t’adressons notre prière, amen. »
Eh bien, rejoignez-nous demain : nous assisterons au miracle de la résurrection de Lazare que nous attendons avec impatience d’aborder ensemble, en étudiant les versets 38 à 44 du chapitre 11 de l’évangile selon Jean.